2014 est l’année du rebond des enseignes en France

25 Novembre 2014
Rémi Lepage

58 % des web-acheteurs français désignent le magasin comme leur méthode d’achat préférée tandis que 28% préfèrent l’achat en ligne.



Le cabinet d’audit et de conseil PwC publie les résultats de sa quatrième étude mondiale sur le e-commerce, menée cette année dans 19 pays auprès de 19 000 web-acheteurs. L’étude révèle que les Français qui achètent des produits en ligne délaissent de plus en plus l’achat sur internet pour revenir en magasin. Les enseignes se sont modernisées et leur taux de pénétration est ainsi en hausse de 3,7 points par rapport à 2013, alors que les pure players ont stagné.

Les consommateurs connectés reviennent en magasin

Les distributeurs rattrapent leur retard sur les pure players grâce à des investissements pour développer leurs solutions multicanales (click & collect, vérification des stocks, retour en magasin) mais aussi en investissant dans les concepts magasins, pour une meilleure expérience client. Le modèle économique des pure players pose question, la rentabilité n’étant pas au rendez-vous, même pour les plus grands.

Le magasin reprend de l’importance dans le parcours d’achat préféré des web-acheteurs français. Ils sont 43% à préférer rechercher et acheter des produits uniquement en magasin, contre 35% en 2013. Selon Sabine Durand-Hayes, associée chez PwC, responsable du secteur Distribution & Biens de consommation, « les Français restent très attachés à l’expérience en magasin pour pouvoir toucher le produit et l’obtenir tout de suite. Certains consommateurs reviennent également en magasin après une mauvaise expérience lors d’un achat en ligne. » Ce retour en force du magasin concerne des secteurs variés :

- alimentaire : 68% des web-acheteurs préfèrent rechercher et acheter en magasin contre 55% en 2013
- cosmétiques : 47% des web-acheteurs contre 35% en 2013
- prêt-à-porter : 45% des web-acheteurs contre 36% en 2013

Les distributeurs récompensés de leurs investissements dans le digital

Taux de pénétration : cette préférence des web-acheteurs français pour le magasin physique se traduit pour les enseignes par un taux de pénétration moyen en hausse de 3,7 points par rapport à 2013. A l’exception de la Fnac, la quasi-totalité des enseignes a ainsi progressé : Carrefour, Leclerc, Decathlon ou encore H&M.

Fréquence d’achat : dans les faits, cette fréquentation en hausse se traduit également par une augmentation de la fréquence d’achat en magasin. En 2014, 35% des web-acheteurs français ont acheté en magasin au moins une fois par semaine, contre 24% en 2013.

Dépenses : les enseignes sont également bien placées sur les achats en ligne. Même si Amazon et CDiscount conservent les 2 premières places du top 10 des acteurs en matière de dépenses, 7 acteurs du top 10 sont des enseignes contre 3 pure players seulement.

Si l’achat se fait majoritairement en magasin, le digital est crucial dans le parcours d’achat. Le premier réflexe des Français en amont d’un achat est de consulter un moteur de recherche en ligne (63 % des Français) ou aller directement sur le site web de l’enseigne ou de la marque recherchée (19 %), bien avant de se rendre en magasin (10 %).

Pour améliorer leurs résultats, les distributeurs se sont adaptés au numérique en s’inspirant des pure players. Le retour en force des enseignes s’explique par les investissements effectués par les distributeurs pour développer les solutions multicanales qui répondent aux attentes des consommateurs :

Click & collect : 75 % des enseignes citées dans l’étude proposent ce service pour répondre aux 46% des web-acheteurs qui apprécient cette option pour obtenir une livraison gratuite.

Vérification en ligne des stocks magasins : 34 % des enseignes citées dans l’étude ont développé un service pour que les clients potentiels puissent s’assurer de la disponibilité du produit et ne pas se déplacer pour rien.

Retour en magasin : 44 % des enseignes citées dans l’étude répondent aux 40 % des web-acheteurs ayant déjà abandonné leur processus d’achat lorsqu’ils se sont rendu compte que le retour en boutique n’était pas proposé.

Quel avenir pour les pure players ?

Selon Pascal Ansart, associé Strategy chez PwC : « ces innovations développées par les distributeurs sont récompensées par les web-acheteurs, qui plébiscitent notamment les acteurs de la grande distribution. Carrefour passe ainsi à la première place du classement des enseignes multicanales préférées des web-acheteurs français (alors qu’il était 6ème il y a trois ans), suivi par la Fnac, Leclerc (qui ne figurait pas encore dans le top 10 il y a 3 ans) et Decathlon. » Les plates-formes de e-commerce qui avaient rapidement conquis les web-acheteurs marquent le pas cette année, avec une légère hausse du taux de pénétration de 0,4 point par rapport à 2013.

De nombreux acteurs sont même en légère baisse : Amazon, Cdiscount, Le Bon Coin. Depuis que les distributeurs ont rattrapé leur retard sur le numérique avec des offres multicanales, ils concurrencent directement les pure players en ligne. Aussi, les Français gardent leur forte affinité pour l’expérience magasin, ce qui amène les pure players, d’Amazon à Miliboo, à investir ce créneau. Anne-Lise Glauser, directrice Strategy chez PwC, analyse que « les pure players les plus significatifs ont des stratégies multi-catégories et sont des agrégateurs d’offre au même titre que ce que l’on voit dans le secteur du voyage ou des services. Pour faire la différence, les pure players doivent innover aussi bien dans les services que dans les nouvelles technologies. L’ouverture à New York du magasin d’Amazon, leader incontesté du commerce en ligne, témoigne de l’importance du magasin dans le parcours client. Mais Amazon poursuit en même temps une stratégie de diversification (tablettes, smartphones, distribution de séries, partage de vidéos, drones), qui pèse sur les résultats ».

En effet, malgré la croissance de ses ventes de 20% au troisième trimestre 2014, la rentabilité n’est pas au rendez-vous. De nouveaux acteurs asiatiques tels qu’Alibaba et Rakuten enregistrent des bénéfices nets impressionnants (respectivement 15% et 16%). Ils pourraient dynamiser le marché et redonner du souffle aux pure players.

Rémi Lepage