Les manuels scolaires, porteurs de préjugés ?

8 Novembre 2010



Les manuels scolaires représentaient 8,8% du chiffre d'affaires de l'édition française en 2009, selon le Syndicat national de l'édition, soit 239 millions d'euros pour 34,5 millions de volumes. Le marché est très concurrentiel. Une douzaine de maisons d'édition spécialisées se partagent le marché. Une guerre sans pitié a lieu entre elles. Et pour cause, le plus souvent, les établissements demeurent fidèles au même éditeur plusieurs années de suite. Il est donc difficile de gagner des parts de marché.

Une approche trop politique ferait chuter les ventes

Dans cette bataille, le choix du contenu est crucial. Pour ratisser large, les éditeurs collent le plus possible aux programmes scolaires et ciblent les multiples tribus pédagogiques d'enseignants. La prudence est le maître mot. Une approche trop politique ferait chuter les ventes. Malheureusement, les manuels scolaires véhiculent souvent les préjugés. Les livres d’histoire et de géographie sont les plus sensibles. En 2008, Économie et société évoquait le phénomène. Deux ans plus tard, le problème est toujours d’actualité.

Article publié pour la première fois le 07/11/2008

Voilà la question que s’est posée la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité (Halde). Et, après analyse de 29 manuels allant de la sixième à la terminale, la réponse est oui. On y trouve des stéréotypes dévalorisant les femmes et les personnes d'origine étrangère, le handicap "rarement évoqué", des seniors associés à la maladie et à la dégénérescence du corps, "l'impasse" faite sur le sujet de l'orientation sexuelle. Le constat est donc plutôt mauvais.

Petits exemples tirés de l’étude. En histoire et géographie, "le stéréotype du Noir pauvre et malade entretient une vision inégalitaire entre Noirs et Blancs". Sur les 3 097 photos des manuels étudiés, une seule est consacrée à l'orientation sexuelle. Pour les femmes, ce n’est pas mieux. Peu de photographies les présentent au travail et quand c’est le cas, c’est une photo d’infirmière.

Autant dire qu’avec ça, les préjugés ont encore de longs jours devant lui. Pour la Halde, il faut changer les représentations, en allant même "un peu au-delà de la réalité à un moment donné afin de donner une image en ligne avec l'ambition qu'on a pour la société".

Discrimination positive, la solution ?

Pour cela, la Halde demande à l'Education nationale que la prévention des discriminations soit présente dans tous les programmes de la 6ème à la terminale et que les enseignants aient une "formation spécifique" à ce sujet.

Quant aux éditeurs de manuels, elle leurs recommande notamment que les personnes "qui souffrent d'une représentation le plus souvent négative soient illustrées dans des situations ordinaires et non systématiquement négatives". Cependant, il ne faut tomber dans le piège inverse : idéaliser la société. Car ce n’est pas en fermant les yeux et en faisant semblant que tout va bien que les problèmes seront résolus.