Mario Draghi fait jubiler les marchés

23 Octobre 2015
Nicolas Chéron



Mario Draghi démontre une fois de plus qu’il sait parler aux marchés ! Si la BCE maintient le statu quo (taux directeurs à 0,05%), la réunion de la banque centrale s’est achevée sur une promesse et un rendez-vous : celle de « réexaminer » la politique monétaire européenne lors du prochain conseil, le 3 décembre. Le Gouverneur de la banque centrale a réaffirmé « la volonté et la capacité d’agir » de l’institution, « si nécessaire ». Il a également évoqué la possibilité d’abaisser le taux de dépôt marginal (aujourd’hui à -0,20%), une mesure incitant les banques à prêter aux acteurs de l’économie plutôt qu’à placer leurs liquidités en dépôt à la BCE.    

Faire plus

Autrement dit, la BCE est disposée à faire plus, pour stimuler davantage l’économie via sa politique de création monétaire. Le volontarisme affiché par la BCE s’explique par la constance du risque déflationniste en zone euro, ravivé par les incertitudes de l’environnement global, entre ralentissement des pays émergents et surabondance de l’offre pétrolière mondiale. Mario Draghi a d’ailleurs anticipé une inflation très faible à court terme.
 
Il n’en fallait pas plus pour rendre euphoriques les marchés boursiers, qui interprètent ce message comme la garantie d’une accélération - et d’une extension dans le temps - du programme de rachats d’actifs obligataires (dont le rythme est actuellement de 60 milliards d’euros par mois). Politique de relance par l’offre, l’injection massive de liquidités sur les marchés a pour objectif de maintenir les taux d’intérêt à un niveau plancher et d’affaiblir l’euro afin de stimuler, in fine, la croissance du crédit, des investissements et la consommation. La faiblesse des taux obligataires, favorable aux débiteurs mais peu incitative pour les investisseurs, rend attractives les actions, comparativement mieux rémunératrices pour les investisseurs.

Une réaction instantanée

La communication des banques centrales, plus que le contenu des mesures engagées, toujours aussi prépondérante pour l’orientation des marchés. La réaction des marchés a été instantanée après la réunion monétaire (forte hausse de indices boursiers européens, baisse de l’euro à 1,11 dollar, taux obligataire souverain allemand à 5 ans en baisse à -1,09%, contre -1,02 avant l’annonce). Les investisseurs ont « acheté » massivement l’annonce plus d’un mois avant que les mesures en question soient officialisées, avec plus de précisions, par la BCE. Comme souvent dans ce type de configuration de marché, le mouvement est peut-être excessif et il est fort à parier qu’au moment de la mise en œuvre de ces mesures d’assouplissement supplémentaires, l’enthousiasme boursier soit retombé.
 
La communication des banques centrales, plus que le contenu des mesures engagées, est décidément toujours aussi prépondérante pour l’orientation des marchés boursiers. Le comportement des investisseurs prouve que l’environnement économique est encore loin d’être normalisé, les fondamentaux structurels et la santé des entreprises n’occupent toujours pas la place qu’ils devraient dans l’évaluation du potentiel de valorisation des actifs.  
   
A propos de l'auteur : Nicolas Chéron est tratégiste chez CMC Markets France.

Nicolas Chéron