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Industrie : les trois piliers de la compétitivité

29 Mars 2012
Jean-Camille Uring
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Le coût du travail : c’est le seul des trois piliers de la compétitivité qui focalise le débat politique sur la réindustrialisation. Non sans raison, car dans l’industrie manufacturière, les écarts sont considérables : une heure de travail coûte plus de 33 euros en France contre moins de 3 euros en Bulgarie, au cœur même de l’Union Européenne. Ce problème est à l’origine des délocalisations. Ces dernières années, 20 à 30 000 emplois auraient été détruits annuellement par des entreprises quittant la France pour des pays à bas coût (INSEE, période 2000-2004).

Soyons cependant lucides : réduire cet écart de coût en pleine crise est indispensable mais prendra du temps et aura un coût pour la collectivité, quelle que soit la solution retenue (qu’il s’agisse de la TVA sociale ou d’une autre). Voilà pourquoi, il n’est plus possible d’écarter du débat les deux autres piliers de la compétitivité industrielle : la formation et la qualification des salariés, d’une part, et la productivité de l’outil de production, d’autre part.

Inadéquation entre offre et demande

Jean-Camille Uring, président du Symop
Jean-Camille Uring, président du Symop
En matière de formation, "l’industrie requiert un certain niveau de qualification de la population active" comme le souligne l’économiste Patrick Artus. Désormais, dans des secteurs comme celui de l’Industrie mécanique, 50% des recrutements concernent des techniciens ou techniciens supérieurs et 20% des ingénieurs. Si l’industrie a perdu beaucoup d’emplois sous-qualifiés, elle crée toujours des emplois qualifiés. C’est donc l’inadéquation de l’offre d’emplois avec la demande qui explique les tensions sur le marché du travail industriel.

Certes, les industriels doivent changer l’image de leur filière et s’engager dans la reconquête des jeunes. Ils le font avec de bons résultats et le feront encore lors de la Semaine de l’Industrie et du prochain salon de l’Industrie, fin mars. Quant à l’État, il doit améliorer les systèmes de formation, en particulier dans l’enseignement technique, pour mettre en adéquation les attentes des salariés et les besoins de l’industrie. De plus, les outils d’accompagnement des mutations, de conseil et d’orientation professionnelle doivent être plus efficaces et intégrer enfin des logiques territoriales.

Plus de 17 ans d’ancienneté

La productivité de l’outil de production est le troisième pilier de notre compétitivité. Ce n’est pas le moindre, mais sans doute le plus oublié. Quand notre outil de production ne prend pas le chemin de l’étranger, du fait des délocalisations, il vieillit en France, sans être systématiquement modernisé et adapté aux impératifs du marché : flexibilité/adaptabilité, juste à temps, petites séries, customisation des produits. La dernière étude réalisée en 1998 sur les machines-outils, a mis en évidence que l’outil de production des PMI avait plus de 17 ans d’ancienneté en moyenne. Facteur aggravant, la crise a malmené l’investissement productif dans l’Industrie.

Faire du levier de la productivité, un pilier de la compétitivité, exige l’intervention de l’Etat. Sa responsabilité est de poser un diagnostic de fond sur le retard de l’outil de production industriel, son obsolescence et son adaptation réelle aux nouvelles contraintes du marché. Il doit ensuite sensibiliser et soutenir les PMI dans leurs investissements productifs. Sans doute en revoyant sa définition de l’innovation et en acceptant d’intégrer dans ses dispositifs d’aide la modernisation de l’outil de production.

Il faudra enfin accepter qu’une PMI qui remplace une machine-outil de plus de 20 ans, par une technologie de production à la pointe du progrès, réalise aussi une véritable innovation, l’innovation dans le process. Agir de concert sur les trois piliers de la compétitivité est devenu un impératif. C’est surtout la seule solution pour enlever tout intérêt aux délocalisations et engager un vrai mouvement de relocalisations.

Sur l’auteur : Jean-Camille Uring est président du Syndicat des entreprises des technologies de production (Symop), sur la thématique du déficit de compétitivité de nos entreprises depuis avril 2011. Il est également directeur général délégué de Fives Cinetic et membre du Comité Exécutif du groupe Fives.



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