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L'éducation française en chiffres

1 Février 2011
Vladimir Vodarevski
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L'éducation française en chiffres
Avant tout, il est important de préciser dès le départ que l'Éducation n'est pas qu'une question de budget et d'effectif. L'école est un sujet complexe donc. Les médias aiment le sensationnalisme, et ils nous présentent une situation critique. Qu'en est-il exactement? Pour situer la France, regardons le classement PISA de l'OCDE. Pisa est une étude très complète du niveau d'éducation dans les pays de l'OCDE, qui comprennent tous les pays développés, et des pays émergents.

La France, dans la moyenne

Selon les classements de cette étude Pisa, la France est dans la moyenne. Ce qui signifie trois choses. D'abord, que la France peut progresser. Ensuite, que les problèmes de la France sont aussi ceux d'autres pays. Enfin, que la situation, comparée aux autres pays, n'est pas si catastrophique. Il faut le souligner, dans les comparaisons internationales, si la France n'a pas le rang qui siérait à la nation de Jules Ferry, où l'Education est un pilier de la République, elle n'a pas une position honteuse non plus.
L'éducation française en chiffres

L'éducation française en chiffres
Ces deux tableaux montrent que, globalement, sur la période 1995-2007, le nombre d'élèves, dans le primaire comme dans le secondaire, a baissé, tandis que le nombre de professeurs a augmenté. L'intérêt de ce tableau est de montrer que les effectifs étudiants ont augmenté depuis 1980, mais qu'ils baissent en 2007 par rapport à 2003. En fait, ils restent dans la même zone depuis 2002.

L'éducation française en chiffres
Ce tableau montre que la France a un nombre relativement élevé d'élèves par enseignant. C'est en primaire que ce ratio est important. Dans le deuxième cycle du secondaire (les lycées), au contraire, ce ratio est plutôt faible.

L'éducation française en chiffres
Il est à noter que la Corée du Sud présente un ratio global équivalent à celui de la France, et un ratio supérieur dans le deuxième cycle du secondaire, tout en présentant de meilleurs résultats que la France à l'enquête Pisa de l'OCDE.

Pour une meilleure interprétation des chiffres, notons que deux pays obtenant les meilleurs résultats à l'étude Pisa de l'OCDE sur l'éducation sont la Finlande et la Corée du Sud. Cette dernière ayant donc un ratio d'élèves par enseignant plus élevé que la France, tandis que c'est l'inverse pour la Finlande. Ce dernier tableau montre qu'en nombre d'élèves par classe, la France est légèrement au dessus de la moyenne des pays de l'OCDE, mais largement en dessous de la Corée du Sud.

Tous ces tableaux démontrent la complexité du sujet. Un pays comme la Corée a des classes qui seraient considérées comme surchargées en France, et, pourtant, ses résultats en matière d'éducation sont bons.La France réduit ses effectifs d'enseignants, mais ceux-ci sont plus nombreux qu'en 1995, alors que le nombre d'élèves a baissé. Il y a par ailleurs de grandes différence entre le primaire et le secondaire.

Une bonne intégration

Ajoutons que la France intègre bien les enfants issus de l'immigration. Une étude publiée sous le titre Le destin des enfants d'immigrés: un désenchaînement des générations, montre que globalement les problèmes rencontrés par ces enfants sont ceux de tous les enfants. C'est l'origine sociale qui est déterminante dans leur parcours. Je ne veux pas ici brosser un tableau idyllique, ni négliger les problèmes. Ce que je veux souligner, c'est que le système français n'a pas que des défauts, et que ce qui est fait ailleurs n'a pas que des qualités. Ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain. L'école est complexe. Gardons toujours cela à l'esprit.

Par ailleurs, les pays étrangers sont toujours friands de nos scientifiques. Notre filière mathématique est reconnue dans le monde. De même les connaissances des cadres français, et la capacité inventive. Nous sommes à la croisée de la rigueur germanique et de la créativité latine.

Faire simplement un état des lieux est complexe. Par exemple, y a-t-il ou non une baisse du niveau des élèves? La réponse classique, qui sonne comme une évidence, c'est oui, le niveau baisse! D'autres répondrons l'inverse. En argumentant que l'analphabétisme est rare aujourd'hui chez les jeunes générations. Et que le niveau global a augmenté. En moyenne, les élèves en savent plus. On peut aussi à nouveau signaler cette reconnaissance internationale pour nos scientifiques. Les classes préparatoires ont également un excellent niveau.

Il y a aussi, en France, mais également aux USA, une relative désaffection pour les filières scientifiques. C'est ce qui ressort régulièrement dans la presse. Je ne connais pas exactement la mesure de ce phénomène. Mais cela montre un facteur externe à l'école. Si les filières scientifiques sont moins pourvues, ce n'est pas forcément à cause d'une baisse de niveau due à l'école, mais aussi aux choix des élèves et des parents.

Cependant, on constate quelques problèmes d'orthographe jusque chez les cadres, pour qui des stages sont même organisés sur ce sujet. Les bacs généralistes paraissent moins exigeants qu'il y a quelques années. Nous sommes passés de math-élem à bac C puis S. Le bac B, assez exigeant, a lui disparu. Il y a des arguments en faveur de la thèse de la baisse de niveau.

Le grand défi : l’éducation de masse

Il y a donc un mouvement vers plus de connaissances de base, un autre vers une baisse, apparemment, du niveau moyen. Mais les grandes écoles très sélectives trouvent toujours les cerveaux en nombre suffisant. Le grand défi, finalement, reste l'éducation de masse. Comment s'adapter aux enfants, Comment assurer à un tel nombre d'enfants, de milieux si divers, de conditions de vie si diverses, la meilleure éducation possible? Nous n'avons pas encore répondu à cette question en France, et d'autres pays non plus.

Pour finir sur cette ébauche de constat, abordons le thème de l'ascenseur social. Cet ascenseur est unanimement considéré comme étant en panne de nos jours, et l'école est pointée comme étant responsable. Selon moi, cette responsabilité est à relativiser. En effet, il y a de nos jours beaucoup plus de formations accessibles à toutes les catégories de population, du moins quand on habite les centres urbains. Par contre, ce sont les débouchés qui ont diminué. En effet, même si l'élévation du niveau d'éducation est nécessaire pour l'ascension sociale, c'est surtout la croissance qui a permis cette ascension. En effet, c'est avant tout l'augmentation du besoin en personnel d'encadrement et de niveau supérieur en général qui a forcé les bonnes familles bourgeoises à recruter parmi le peuple.

Un "climat" d'étude

Ce constat, ou plutôt cette ébauche de constat faite, que peut-on faire pour améliorer le système éducatif français? Une méthode logique consiste à voir ce qui se fait ailleurs. Deux des pays qui obtiennent les meilleurs résultats au classement PISA de l'OCDE sont la Finlande et la Corée du Sud. On peut trouver facilement des informations sur la Finlande. Malheureusement beaucoup moins sur la Corée. Par conséquent, la comparaison se fera essentiellement par rapport à la Finlande.

La Finlande et la Corée du Sud ont deux systèmes éducatifs très différents. Pour caricaturer, disons que celui de la Finlande se veut "progressif", en faisant en sorte par exemple que l'enfant se sente comme chez lui à l'école. Tandis que le système coréen ressemble plus à la France des années 1950-1960, avec par exemple une discipline stricte. Quels point communs peut-on néanmoins leur trouver?

Un point commun est ce que j'appellerai le respect de la classe. En effet, en Corée du Sud, c'est la discipline à l'ancienne qui est appliquée. Ce qui permet à l'instituteur de "tenir" une classe nombreuse. En Finlande, il est développé un respect mutuel entre l'enseignant et les élèves, ce qui favorise l'attention en classe. Les élèves respectant également les locaux. Il est notable aussi que parmi les objectifs de l'éducation en Finlande il y ait «d'aider les élèves à croître en humanité et à devenir responsables de la société» (Basic Education Act,1998), ou «des individus bons, équilibrés, cultivés et intégrés dans la société» (Upper Secondary Schools AcT, 1998) (citations extraites de La Finlande: un modèle éducatif pour la France? de Paul Robert).

Par ailleurs, la Corée du Sud est un pays où la compétition scolaire est acharnée: les parents poussent leurs enfants dans les études. La Finlande a su réformer son système éducatif dans un relatif consensus, ce qui dénote un souci commun pour l'éducation. Enfin, aux USA, certains comparent les immigrés asiatiques aux immigrés "wasp" (white, Anglo-Saxon, Protestant) des précédentes vagues. Les enfants de ces immigrés asiatiques sont poussés par leurs parents, pour qui l'éducation est importante, comme les wasp de l'époque. En effet, ces enfants asiatiques ont de bons résultats scolaires.

Quelles conclusions tirer de tout cela? D'abord, l'ambiance en classe est importante. Il y a plusieurs méthodes pour l'obtenir. La discipline, comme en Corée. L'acceptation de valeurs communes, et un climat de confiance, comme en Finlande. Ensuite, l'état d'esprit des parents est important. En Corée, les parents poussent leurs enfants. En Finlande, il y a manifestement un consensus en faveur de l'éducation. Et les observations faites aux USA confirment l'importance de cette composante. L'ambiance du milieu familial a une importance.

Tout se joue très tôt

Il y a régulièrement en France un courant réclamant le retour à la discipline et à l'uniforme à l'école. On voit avec l'exemple de la Finlande que l'important est surtout l'ambiance de la classe, la capacité d'attention de l'enfant. La discipline à la coréenne peut être efficace au début. Mais ensuite, il y a un moment, que je suis bien incapable de préciser, où il est important que les élèves apprennent à travailler en groupe. En effet, il est reconnu que le système éducatif américain n'est pas le meilleur globalement, mais qu'il a une qualité: il apprend les élèves à coopérer.

Nous sommes à nouveau confrontés à la complexité du sujet. Le débat sur la discipline renvoie à l'ambiance en classe. Mais l'attitude des parents a de l'importance. Il faut qu'ils acceptent les méthodes de l'école, et le fait, peut-être de pousser un peu les enfants à l'école. En tout cas, il est nécessaire de créer une ambiance propice à l'enseignement.

L'enseignement en Finlande se caractérise également par la volonté de détecter tôt les difficultés des enfants, et d'y remédier le plus vite possible. Dès le plus jeune âge. Sachant que pour la Finlande, l'école proprement dite commence au plus tôt à 6 ans. Auparavant, les enfants sont au jardin d'enfants.

Je n'ai pas d'info sur la Corée du Sud à ce sujet. Par contre, tous les articles que j'ai pu lire confirment qu'il est essentiel de détecter tôt les difficultés de l'enfant. Il est généralement préconisé de prendre à part quelque temps ces enfants, pour des cours plus spécifiques, mais pas de les mettre dans des classes spéciales.

Le budget de l'école en question

Notons que ce qui vient d'être évoqué ici va à l'encontre de la politique de discrimination qui se développe. Pour l'éducation, beaucoup se joue au primaire. La discrimination ne règlera donc rien. Pour illustrer les différences entre la Finlande et la France, voici la répartition des budgets. On constate que la Finlande dépense plus par élève que la France en primaire et au niveau du collège, tandis que la France dépense plus au lycée.

Les bons résultats de la Finlande ne s'explique pas par des dépenses plus élevées que la France, en montant par élève, ni en pourcentage du PIB. La Corée présente des dépenses plus élevées en pourcentage du PIB, du fait de l'investissement des familles.

Ces tableaux montrent donc que la France ne souffre pas d'une insuffisance d'investissement public dans l'éducation. C'est plutôt l'organisation, la manière d'enseigner qui font la différence. Sachant qu'en Finlande les élèves sont bien encadrés, le professeur disposant souvent d'un assistant au primaire et au collège, et les classes ne sont pas surchargées. Par contre, il n'y a pas de corps d'inspecteurs. Par ailleurs, les dépenses des USA en matière d'éducation, en pourcentage du PIB, sont très élevées. Cependant, les USA n'ont pas de meilleurs résultats que la France en matière d'éducation.

Vladimir Vodarevski est économiste de formation. Il travaille actuellement dans le domaine de la fiscalité d'entreprise. Il tient un blog sur l'actualité économique.



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